Associes-vautours | Pat Brosseau

Les associés-vautours!

Vous savez tous maintenant que je suis un acteur. Un très grannnnnd acteur ! Qui ne vit pas de son métier… J’ai donc une autre passion dans la vie : l’immobilier. Ou plus précisément, les flips. J’adore faire ça, c’est vraiment du bonheur.

À mes débuts, j’ai choisi de m’associer avec un ami. C’était un gars d’expérience, en qui j’avais une totale confiance. Un homme excessivement gentil, sans malice, etc. Tout cela, aux premiers abords seulement ! Mais moi, à la limite, je le voyais presque comme « un sauveur ». Je me disais qu’il allait m’enseigner la business du flip et que, peut-être, de cela allait naître une longue collaboration…

Un jour, nous sommes à la quincaillerie pour acheter toutes sortes d’outils pour les rénovations de notre flip. Soudain, j’aperçois mon associé déballer et ouvrir une boîte pour mettre des trucs dans sa poche… Je le regarde, stupéfait, et lui demande ce qu’il fait ! Il me répond de ne pas m’en faire, que tout le monde fait ça. Il avait besoin seulement d’un truc dans la boîte et pas des autres instruments qui venaient avec…

Je suis sous le choc. Je lui dis de ne plus jamais faire ça en ma présence. Je lui mentionne aussi que je vais sortir du magasin — seul — et que je ne veux pas passer à la caisse avec lui. Il me trouve drôle. Il ne peut s’empêcher de rire de moi. Disons que je suis un peu insulté de son attitude.

Une fois dans la voiture je lui dis que ça n’a pas de maudit bon sens ce qu’il vient de faire, que c’est du vol, et que je ne peux supporter ça.

Il rit encore de moi.

Voyons, dit-il, c’est juste des « cossins » qu’on ne peut pas trouver individuellement… Que c’est pour ça qu’il avait fait ça. De ne pas m’inquiéter.

Moi je lui dis : « Ça veut-tu dire qu’il faut que je me méfie de toi ? Tu peux me voler n’importe quand ??? Parce que “qui vole un œuf vole un bœuf” ».

Il rit encore de moi et me rassure en me disant que jamais il ne me volerait jamais et que je peux avoir complètement confiance en lui.

Et moi, grand insignifiant, ou plutôt grand naïf, c’est ce que j’ai fait. Je me suis fermé les yeux sur ce petit vol. Je l’ai même oublié. Bravo champion… Mauvaise décision de ma part.

Un jour, un ouvrier vient me voir en me disant que mon associé l’avait engagé pour des rénovations chez lui et qu’il lui avait demandé de facturer ses heures sur notre compagnie. Cet ouvrier me disait de me méfier et de vérifier les achats.

Mon associé était celui qui s’occupait des achats. Pis moi, comme j’avais une confiance sans bornes en lui, je ne vérifiais pas les achats… Un autre beau point d’inaptitude pour moi. Je devrais en faire une collection…

Comme il faisait de la rénovation chez lui en même temps que notre flip, il mettait ses achats personnels sur notre compagnie. « Quand il y a de la gêne, il n’y a pas de plaisir ! »

Grosso modo, j’ai payé la moitié de ses rénos !!! Tab…..

Pour faire une histoire courte, comme on avait fait beaucoup d’argent avec ce projet, je ne l’ai pas poursuivi, ça aurait pu me coûter mes profits. Ça n’en valait pas la peine. Mais quand même, si je vous dis qu’il faut avoir les yeux ouverts et ne pas banaliser le moindre signe douteux, ce n’est pas pour rien. Malgré une confiance aveugle, on doit tout vérifier…

On s’entend-tu, que je me suis juré que je ne ferais plus d’associations ?!

Promesse d’ivrogne… J’ai fait une autre association. Oui, oui. Et avec un autre ami. Un gars « vraiment cool », qui prêche par l’amitié et que « c’est l’amitié d’abord et avant tout ». Un gars qui a pas mal d’expérience, qui a fait des plus gros projets que moi, mais surtout un gars qui lui aussi a eu une mauvaise expérience d’affaires avec un ami. « Bon ! Enfin un gars qui va me comprendre », me suis-je dit. Un gars qui me semble avoir de l’argent pour investir avec moi. Un gars sur la même longueur d’onde que moi. C’est fantastique. 

Je trouve donc un projet très intéressant. Je lui en fais part et lui demande s’il est intéressé. « Oui, oui, oui. » Il est très intéressé. Je fais l’offre d’achat très rapidement, et c’est accepté. On se rencontre pour en discuter, notamment de comment on envisageait de travailler ensemble. Je lui dis que, pour moi, la meilleure manière c’est de splitter 50-50. À ce moment-là, il m’annonce qu’il n’a aucun capital à mettre dans le projet. Je dois vous dire que je suis resté très surpris. Ce n’est pas du tout ce qu’il laissait sous-entendre. Au contraire, il a mentionné avoir plusieurs compagnies, plusieurs blocs… La grosse business qui roule… Disons que ça m’a un peu déstabilisé. Il me demandait de lui prêter de l’argent à tant de pourcentage. Mais moi je n’ai jamais travaillé comme ça, ça me rend mal à l’aise. Par contre, j’avais le goût de travailler avec lui parce qu’il mettait toujours l’emphase sur l’amitié. Ça me parlait, parce que moi, je ne travaille que dans le plaisir. On devait donc simplement trouver une solution… On en est arrivé à une entente : je m’occupais de mettre l’argent et lui s’occupait de la construction. Notre deal était 50/50. Je savais que je faisais moins d’argent comme ça, mais avec ses discours, il me donnait l’impression qu’il allait m’apprendre de nouvelles astuces du métier.

Une fois passés chez le notaire, son attitude a changé petit à petit. Jusqu’au moment où, pour un truc anodin, il a pété sa coche et m’a manqué de respect. Il a fini par me dire qu’il n’avait pas besoin de moi pour faire le projet. (Rappel : on s’entend que c’est MOI qui ai trouvé le projet et MOI qui ai mis l’argent.) Il disait qu’il était prêt à me céder ses parts. (Et dans sa version aux autres, il affirmait plutôt qu’il était prêt à se tasser du projet pour conserver notre amitié.) Bref, on ne s’obstinera pas là-dessus. 

Là, moi je lui réponds que de toute manière ça pas de bon sens. On est passé chez le notaire, on est copropriétaires. Il me répond que tout est possible que ce n’est pas un problème. Je le laisse se calmer et je planifie une rencontre une autre fois en me disant que ça va s’arranger.

À l’autre rencontre, il est toujours dans une humeur de merde et finit par me redire les mêmes choses.

Dans mon cœur, je ne peux pas continuer à travailler dans cette ambiance-là. Pour moi, le succès d’une association passe par le respect. Et là, il y a zéro respect. On est au début du projet, c’est le temps de se laisser.

En passant, je viens à ce moment dans ma vie de faire une crise cardiaque, et je me remets tranquillement de mes émotions. Disons que ma tolérance au non-respect, aux crisettes pour n’importe quoi, est nulle. Je n’ai vraiment pas besoin de ça. Je ne veux plus travailler dans ce genre de stress et avec ce genre de gars là. Je m’assois donc avec lui et lui explique où j’en suis par rapport à ce qui s’est passé et où j’en suis dans ma façon de vouloir travailler avec ce que je viens de vivre.

J’accepte donc sa proposition de me céder ses parts et de nous séparer. Ah non, c’est vrai, je devrais plutôt dire que j’accepte qu’il se tasse pour conserver notre amitié parce que, comme il a toujours dit, « notre amitié est plus importante ». Disons qu’il ne s’attendait pas à ça. La discussion a été très cordiale, il m’a même appelé par la suite pour me remercier de lui avoir parlé comme ça et d’avoir été franc.

Dans notre discussion, aussi, je lui ai garanti que j’allais payer le temps qu’il avait mis sur le projet, pour les réunions, pour les personnes qu’il nous a trouvées pour l’inspection entre autres, pour avoir négocié le locataire de quitter les lieux, etc. Je voulais être juste avec mon ami.

Et bien, croyez-moi, l’amitié a pris le bord. Il ne veut plus me céder ses parts et, en plus, il me demande une somme exorbitante pour notre séparation. N’oublions pas qu’il n’a pas mis aucun sou et qu’il n’a même pas commencé sa tâche de construction, on est au début du projet, on est à l’étape des plans ! Ça fait à peine deux mois qu’on travaille ensemble !!!

Comme ma femme est partenaire avec moi dans les flips, il m’a même demandé de l’évincer pour qu’on puisse travailler juste les deux…

Non mais, faut-tu être imbécile ? En plus de ne pas vouloir « se tasser » comme il dit si bien, il veut mettre le trouble dans mon couple. On aura tout vu !!!

Mais on est toujours 50/50 et il joue là-dessus. On appelle ça, dans le jargon, de « l’escroquerie légale ». C’est très connu : tu es malhonnêteté, mais légalement…

J’assume ma responsabilité : je n’aurais jamais dû accepter ce deal à 50/50. Un deal comme ça, ça peut être intéressant, par contre si vous mettez l’argent et l’autre s’occupe de la construction, je vous conseille d’avoir au minimum 51 % des parts, et de ne laisser pas plus que 49 à l’associé. De cette manière, vous serez en position de prendre les décisions. Après tout, quand on met l’argent, on se doit de garder le contrôle. Si l’autre accepte ce deal, c’est qu’il est honnête. D’ailleurs, je lui ai même proposé de continuer après quelques discussions, mais à 51/49. Et il a refusé !!! Là, j’ai compris que ce qu’il voulait, c’était mon argent et que tout était calculé…

Donc dans l’histoire, je suis pris avec un gars qui ne veut pas négocier, qui ne veut pas admettre ses torts et qui veut — ouvertement — mon argent. Il me demande 65 000 $… Quand même pas pire pour un gars qui a assisté à maximum 10 réunions, fait quelques appels, quelques calculs et tout ça en deux mois. N’oublions pas que son mandat était de s’occuper de la construction et qu’il n’a pas mis une cent… Je suis sur le cul, 65 000 $… Vive l’amitié.

Je fais une enquête auprès d’amis dans le milieu à savoir ce qu’ils en pensent. Certains me répondent de ne pas lui donner un sou et d’aller en cours. Que ce gars-là n’a pas d’argent, il ne pourra pas te suivre… D’autres me disent de lâcher prise et de vendre, mais en vendant je n’aurai pas le choix, je devrai lui donner la moitié des profits s’il y en a, car nous sommes 50/50. Je finis par céder un peu et lui offre 40 000 $ pour m’en débarrasser. Croyez-moi, croyez-moi pas, il m’a dit que j’étais très loin de ses attentes et qu’il ne descendrait pas d’un sou. Puis il me dit que le bloc a pris beaucoup de valeur. Nous l’avons acheté (ou plutôt je l’ai acheté) 750 000 $ et que maintenant il vaut 950 000 $. Wow !!! Une augmentation de 200 000 $ en 7 mois. Vous voyez à quel point il est un peu dérangé. Je l’écoute toujours, il me propose de me remettre la moitié de ce que j’ai mis et qu’il s’occuperait de la vente sans agent d’immeuble comme ça on n’aura pas de commission à donner. Je lui réponds que je vais réfléchir à sa proposition et que je vais aller rencontrer trois agents d’immeubles pour avoir leur opinion. Ma confiance en lui est à -1000. Je fais mes devoirs… et je rencontre des courtiers. À part son agent d’immeuble avec qui il travaille, tous me répondent que c’est impossible. Les semaines passent et il me fait finalement savoir qu’il n’est plus acheteur, qu’il est prêt à négocier à 60 000 $. Au lieu de 65 000 $.  Le vautour a besoin d’argent…

Je lui propose de faire évaluer l’immeuble et que je lui remettrai la moitié du profit qu’on aurait fait en vendant. Mais monsieur ne croit pas aux évaluateurs. Il veut mon argent et surtout il ne veut pas que je garde l’immeuble. Pourquoi ??? Qu’est ce que j’ai fait à ce type pour qu’il agisse comme ça ???

Encore aujourd’hui, nous sommes toujours en litige, mais je fais confiance en la vie. Ça devrait s’arranger d’ici peu.

J’appelle ça néanmoins un vautour qui plane au-dessus d’une proie qui pourrait bien lui faire faire de l’argent à ses dépens…

Tout ça, m’a quand même appris quelque chose. Parce que chaque mauvaise expérience est nécessaire pour aller plus loin…

Je me suis donc mis à me poser plusieurs questions sur les associations.

Parce que malgré tout, je crois sincèrement qu’il est possible de trouver la bonne personne. Mais tout d’abord, on doit faire un petit travail. Ce que je n’ai pas fait dans mes deux associations. J’ai appris, croyez-moi.

Voici donc mes conseils. Oui, oui, mes conseils… (je pense sincèrement être très bien placé pour donner des conseils sur comment choisir ou pas un associé) :

Avant de vous associer, définissez vos objectifs!

Avant de commencer à chercher LA personne idéale, vous devez vous poser plusieurs questions :

  • M’associer est-il vraiment indispensable ? 
  • Quels sont les objectifs de cette association ?
  • Quelles sont les compétences dont j’ai besoin ?

Dans mon cas, avec mon premier trou du c**… oui, pour moi, c’était indispensable. J’avais à apprendre ce métier. Je n’avais pas trouvé le meilleur prof, mais bon, j’ai appris. Pour mon deuxième, le psychopathe, non je n’avais pas besoin de travailler avec quelqu’un. C’était plutôt lui qui avait besoin de moi ($$$).

Aussi, ces questions vont vous permettre de définir le profil de votre futur associé. Celui qui partagera votre vie d’entreprise et vous épaulera dans cette belle aventure. (Par ce que je crois sincèrement que ça peut être une belle aventure avec un associé, d’ailleurs c’est ce que je souhaitais avec chacun d’eux. Mais bon, il s’est avéré des aventures catastrophiques pour moi.) Votre associé vivra avec vous les bons comme les mauvais moments. Les périodes de réussite comme les problèmes. Il va devenir une personne importante, un allié en qui vous devez avoir une totale confiance.

Toujours avoir les yeux ouverts!

Ce que je veux dire, c’est que même si vous avez entièrement confiance en votre partenaire, ne jamais laisser les choses sans vérifier. Assurez-vous que le travail de votre acolyte est bien accompli. Soyez sensibles aux signes et aux agissements de l’autre. Sachez lire entre les lignes et faites confiance en votre intuition, même si cela peut engendrer une séparation. Voilà !

Avec votre associé, partagez la même vision!

Comment imaginez-vous le futur ? Quels sont les objectifs de votre futur associé ? S’associer, c’est pouvoir regarder dans la même direction, être en phase dans vos idées et vos réflexions pour renforcer votre créativité. Si vous ne partagez pas les mêmes valeurs dès le départ, c’est le conflit assuré !

Pour que votre association fonctionne, assurez-vous aussi d’avoir une vision commune de votre business, un but commun. Privilégiez une personne ambitieuse, déterminée, impliquée dans votre business et ne se décourageant pas devant les premières difficultés. Exactement ce qui s’est passé avec mon dernier associé. Il a paniqué pour des plans pas terminés. Tout aurait pu être si simple et sans complication. Il ne voulait que sa vision…

Soyez complémentaires!

Cet aspect doit avoir une place importante dans le choix de votre associé. Votre partenaire doit disposer de compétences complémentaires aux vôtres pour que, ensemble, vous amélioriez vos chances de réussite. Vos personnalités doivent se compléter également. En effet, si vous avez un caractère fonceur, je vous conseille de choisir un allié avec une personnalité plus calme. Cette complémentarité va souder votre équipe. Dans le cas de mon premier associé, il était plutôt calme, et moi bouillant. Pour mon deuxième et non le moindre, nous étions deux gros tempéraments, plus ma femme. OMG, l’explosion était prévisible.

Privilégiez la discussion!

Afin d’évoluer dans un climat serein, vous devez être capable de tout vous dire les vraies affaires. Échangez régulièrement, faites des points de la situation de votre business. Abordez tous les sujets ensemble, même les plus délicats ! Votre relation au quotidien repose sur une communication transparente. En bref, soyez ouvert à toute discussion !

Bien entendu, il vous arrivera de hausser le ton à certains moments (de grâce, n’arrivez pas aux poings comme il a failli se passer avec mes arnaqueurs), une entente parfaite n’existe pas. Cependant, veillez à crever l’abcès pour repartir sur des bases saines et « le fun ».

Pensez à bien rédiger votre pacte d’associés!

Laisser entrer une autre personne dans son activité peut se révéler compliqué en ce qui concerne l’organisation. Pour cela, veillez à bien rédiger votre pacte d’associé. Il s’agit d’un contrat qui détermine les responsabilités de chacun, vos rôles dans l’entreprise, mais également les possibilités de sortie. Ce contrat vous permettra de vous poser toutes les questions essentielles et vous aidera à mettre de l’ordre dans votre esprit. Dans mon cas, avec mon deuxième vautour, je lui avais envoyé une reconnaissance de dettes qu’il n’a jamais signée. Je lui ai demandé à plusieurs reprises de la signer et il me répondait « oui oui je vais faire ça ». Jamais il n’a signé. En plus, c’était son avocate qui s’occupait de rédiger notre pacte d’associé. Il n’a jamais été fait. Était-elle de mèche avec lui ??? 

J’espère que mon expérience pourra vous aider si un jour vous avez à prendre une décision à savoir si vous vous associez avec quelqu’un.

N’hésitez pas non plus à poser des questions aux gens qui connaissent la ou les personnes avec qui vous voulez faire équipe. Vous aurez un bon son de cloche…

Faites confiance en votre intuition. De mon côté, j’avais vu les signes pour ne pas faire équipe avec ce gars, mais je me suis laissé tenter par son discours sur l’amitié. Notre instinct peut vraiment faire la différence dans une décision comme celle-ci.

Vous l’aurez compris, le choix d’un associé n’est pas anodin et fais partie d’un véritable travail de réflexion. Chercher le bon allié peut être une démarche longue et impliquant, mais, une fois trouvé, c’est peut-être le début d’un engagement durable et d’un avenir prometteur !

Que voulez-vous, je crois encore à un monde meilleur dans toutes les sphères de la société et un jour les vautours seront en extinctions…